Nous avons souvent tendance à sous-estimer la culture, voire à la mettre de côté. Et pourtant, sa présence est parmi nous quotidiennement. A cet égard, la culture ne désigne pas qu’un simple ensemble de pratiques succédant à la nature, elle doit avant tout se définir dans son sens le plus large. Nous avons décidé d’en parler aujourd’hui avec Mr MOHAND OUALI ARAB (espoirmd@yahoo.fr), étudiant en deuxième année de Master EGA à l’Université d’Artois (Pôle d’Arras). Celui-ci a effectué son stage de fin de cursus universitaire à la Direction Générale de la Chambre de Commerce et d’Industrie d’Arras (voir "Nb" en fin d'article). Avec lui, nous sommes longuement revenus sur le thème central de son étude : la culture et le mécénat d’entreprise.
Tout d'abord, un premier constat nous saute aux yeux. Si le mécénat est, d’une manière générale, un sujet d’actualité, il n’a, cependant, guère fait l’objet d’études approfondies durant ces dernières années. L’occasion était donc belle pour Mr ARAB et sa structure d’accueil (la CCI d’Arras) d’explorer ce vaste sujet, qui, au passage, présente de nombreuses opportunités.
Mais pour comprendre le mécénat, il faut avant tout revenir aux origines de cette notion. Caius Cilnius Mæcenas, ce nom ne vous dit peut-être rien. Le nom francisé « Mécène » un peu plus. Au temps de la Rome Antique, il fut un homme politique célèbre pour avoir consacré sa fortune et son influence à promouvoir les arts et les lettres. C’était pour la petite histoire. Mais nous comprenons néanmoins l’idée générale qui entoure aujourd’hui la notion de mécénat. Pour autant, il nous faut l’isoler d’une autre notion, celle du sponsoring. En effet, nous avons tendance à confondre les deux termes ou bien à évoquer l’un plutôt que l’autre. Si le mécénat et le sponsoring représentent des opérations de communication pour une entreprise, les intérêts ne sont pas les mêmes dans les deux cas. Une entreprise qui pratique le mécénat, le fait pour son image et dans le but de témoigner qu’elle n’est pas vouée qu’à la seule rentabilité économique. « Entreprendre une action de bienfaisance en direction d’une association et dans un but d’intérêt général ». Voilà l’esprit du mécénat, celui de mettre en avant l’esprit citoyen des entreprises. Il peut prendre ainsi différentes formes : mise à disposition de personnels, de biens, de services, aides financières…etc. Le sponsoring revêt également une question d’image, mais contrairement au mécénat, la dimension pécuniaire est présente. En effet, avec le sponsoring, l’entreprise recherche une rentabilité à court terme. A l’heure actuelle, les entreprises misent davantage sur le sponsoring que sur le mécénat. Malgré tout, depuis les années 1980, plusieurs acteurs ont essayé de relancé l’idée de mécénat au sein de la sphère entrepreneuriale. C’est le cas notamment de l’ADMICAL (Association pour le Développement du Mécénat Industriel et Commercial) créée en 1979. Il s’agit d’un organe de sensibilisation au mécénat d’entreprises ( http://www.admical.org/ ). Plus récemment, une loi a permis de faire évoluer le cadre du mécénat. En effet, en 2003, l’exécutif a voulu envoyer un signal fort : « l’Etat n’est pas le seul garant de l’intérêt général, la société civile (en particulier les entreprises) a un rôle à jouer ». La loi Aillagon de 2003 permet ainsi 60 % de déductibilité fiscale des dons effectués pour le mécénat d’entreprise. Celui-ci représente donc une belle et réelle opportunité, qu’il s’agit de saisir au bon moment. Comme le souligne notre interlocuteur du jour, « le sponsoring est une question claire, alors que le mécénat est de nature beaucoup plus subtile ».
Par conséquent, le mécénat et plus principalement sa territorialisation méritent un sérieux éclairage. Prenons un premier exemple : Lille 2004, capitale européenne de la culture. Toutes les manifestations qui se sont déroulées durant cet événement n’auraient pu avoir lieu sans le concours de nombreux mécènes. Aujourd’hui, nous reconnaissons tous le succès de Lille 2004, y compris l'élan dynamique que celui-ci a pu entrainer pour l’ensemble de la Métropole lilloise. Preuve que la culture peut servir de vecteur essentiel au développement d’un territoire. Grâce à cet engouement, la région Nord-Pas-de-Calais, a décidé de porter, tous les deux ans, la culture au devant de la scène. Ainsi, en 2007, Valenciennes a été désignée comme « capitale régionale de la culture ». Des entreprises-mécènes ont pu ainsi participer à ce projet. Au niveau de la motivation des entreprises, soit celles-ci se positionnent en tant qu’acteur-volontaire du projet, soit elles peuvent répondre à des demandes formulées par des associations ou des organisations. C’est le cas notamment pour le projet Louvre 2 à Lens. A cet égard, nous vous invitons à lire ce présent lien, pour mieux comprendre: http://www.louvrelens.fr/fr/soutenir-projet.html
Le mécénat se doit donc d’intéresser l’ensemble des acteurs, sans exception. Par ailleurs, concernant notre terrain d’observation, nous pouvons dire que le territoire arrageois a un rôle primordial à jouer. Pour l’heure, nous constatons sur ce territoire qu’aucune dynamique n’est visible autour du mécénat. Il s’agit, pour le moment, de quelques actions isolées. Et pourtant, à l’heure où la « ville durable » est mise en lumière par les élus, ne serait-il pas judicieux de se pencher rapidement sur ce dossier ? Par bien des aspects, comme le rappelait Mr Arab, la culture entre dans le cadre de la responsabilité sociale des entreprises (RSE), et donc plus généralement dans la sphère du développement durable, celle qui concerne l’ensemble du territoire. Nous avons déjà pu observer que des structures, comme le CPIE-Villes de l’Artois (Arras) considéraient la culture comme un axe incontournable du développement durable : http://www.cieu.org/spip.php?article87 .
Pour résumer, le mécénat d’entreprise, c’est un domaine de prédilection : la culture. Néanmoins, le mécénat solidaire, de l’environnement, de la recherche et du sport sont autant d’autres domaines sur lesquels les entreprises peuvent se positionner. Le mécénat d’entreprise, c’est aussi plusieurs enjeux : la communication (image et reconnaissance), la fiscalité (déductibilité fiscale), les réseaux (vecteur de développement local), le management (la RSE). Le mécénat d’entreprise, c’est également une attitude philosophique, une question d’éthique, qui vise l’intérêt général (le grand public), contrairement au sponsoring qui vise une cible plus restreinte. Mais le mécénat, c’est avant tout la rencontre et l’échange. Pour le moment, il subsiste encore un grand nombre de méfiances entre le milieu entrepreneurial et le tissu associatif. Les deux mondes se tournent encore le dos, et pourtant, dieu sait qu’ils ont sûrement des choses à se dire… Une réponse locale est attendue prochainement. A noter que si la CCI d'Arras a fait appel à un étudiant de l'Université d'Artois pour examiner d'une manière générale la thématique du mécénat, c'est qu'elle entend réaffirmer son rôle de relais majeur pour le territoire, d'impulseur de dynamiques. Rappelons que les principales missions de la CCI sont d'informer, de former et de sensibiliser les acteurs économiques. La thématique du mécénat entre dans ce cadre d'action. Elle aura ainsi l'occasion de pouvoir développer ce sujet dans les mois à venir, en se basant sur la présente étude réalisée par Mr Arab.
PF
Nb: En 2010, les trois Chambres de Commerce et d'Industrie d'Arras, Béthune et Lens donneront naissance à la CCI DE l'ARTOIS. Au regard de ce présent article, ce dernier élément est de grande importance.